Une nouvelle jonction pour Genève
Joanie Goulet
16. de març 2020
Photo : Roman Keller, Eik Frenzel
Le dernier bâtiment qui complètera l’Ecoquartier Jonction est sur le point d’être terminé. Aperçu du tout premier quartier de ce type sur sol genevois.
La Jonction est un quartier en forme de pointe situé au confluent du Rhône et de l’Arve. Par cette situation géographique, le lieu fut longtemps occupé par des activités industrielles. Dans le périmètre de l’Ecoquartier Jonction, situé entre le boulevard Saint-Georges et la rue du Stand, l’industrie y régna pendant plus de 160 ans. La vocation industrielle du site pris fin dans les années 1990. Par la suite, des artistes et des artisans s’approprièrent le lieu abandonné et fondèrent le collectif Artamis. Mais le terrain et les bâtiments qu’ils occupaient étaient pollués et il devint inévitable de tout assainir. C’est ainsi qu’en 2008 débuta la longue opération de démolition et décontamination et qu’en 2009 le concours d’urbanisme et d’architecture à deux degrés fût lancé. Aujourd’hui, le chantier pour le premier écoquartier du canton touche à sa fin. Plus de trois cent appartements dont plusieurs en coopérative sont habités, les vélos abondent et les arcades commerciales sont bien vivantes.
Un intérieur de l’immeuble CODHA (photo : Roman Keller, Eik Frenzel)
Vue d’une coursive de l’immeuble FGVLS (photo : Roman Keller, Eik Frenzel)
L’Ecoquartier Jonction est composé de quatre bâtiments hors terre. Les trois premiers bâtiments ainsi que les sous-sols et les espaces extérieurs sont issus du concours remporté en 2010 par le bureau Dreier Frenzel architecture + communication. Alors qu’il n’y a eu qu’un seul concours pour ce lot, chaque bâtiment a été réalisé par un maître de l’ouvrage distinct. Le premier bâtiment est un immeuble de sept étages de la Fondation de la Ville de Genève pour le logement social (FVGLS). Il se développe autour d’une grande cour intérieure de 35 mètres de longueur bordée de coursives. Le deuxième bâtiment est un immeuble de six étages avec trois cours intérieures construit pour la Société coopérative d’habitation Artamis des Rois. Et le troisième immeuble est celui de la Coopérative de l’habitat associatif (CODHA) qui cumule 10 étages et comporte des appartements communautaires allant jusqu’au 25 pièces. Les trois bâtiments sont plutôt massifs et imposants. Par ailleurs, leurs rez-de-chaussée sont perméables au public et offrent de nombreux passages et des lieux de rencontre. Les espaces commerciaux, culturels et artisanaux occupent les rez-de-chaussée et les logements occupent les étages supérieurs. Le système structurel poteaux-dalle rappelle le passé industriel du site et permet une certaine flexibilité pour accueillir la grande variété typologique déployée pour les logements, véritable point fort du projet.
Le quatrième bâtiment a fait l’objet d’un concours de projets d’architecture à un degré et a été remporté en 2012 par Lacroix Chessex architectes. Le chantier a débuté au printemps 2018 et devrait se terminer vers la fin de cette année. Son programme est complexe et rassemble des équipements publics variés. En contraste avec les trois bâtiments de Dreier Frenzel, le gabarit de ce bâtiment est de moindre taille. Il est composé d’une charpente métallique de trois étages dont les façades sont habillées d’un parement en briques. La « maison de briques » abritera notamment les locaux d’activités parascolaires ainsi que la plus grande crèche du canton (170 places). Cette construction est posée sur un socle en béton apparent semi-enterré qui accueillera une salle de sport et une salle pluridisciplinaire d’une capacité de 500 personnes.
Le bâtiment s’implante à l’angle du boulevard Saint-Georges et de la rue des Gazomètres et libère une place qui créera une remarquable entrée sur l’Ecoquartier Jonction, ce que le reste du projet n’a pas réussi à faire.
Un grand espace de 18'500 m2 en sous-sol abrite les biens culturels de la Ville de Genève (photo : Roman Keller, Eik Frenzel)
Plusieurs genevois aiment critiquer ce nouvel écoquartier. La critique la plus courante est que c’est un espace sans verdure, et donc, que ce n’est pas un « éco-quartier ». Peu importe la définition de ce néologisme, ce projet se veut définitivement urbain. La verdure est plutôt réservée aux habitants qui bénéficient de potagers en toiture et de cours intérieures végétalisées. Le préfixe éco est attribuable aux longues démarches participatives mises en œuvre dès les balbutiements du projet, à la reconversion d’un site contaminé, aux appartements en coopérative d’habitation, aux espaces extérieurs exempts de voiture et à l’utilisation d’énergies renouvelables. A ce sujet, les bâtiments sont reliés au nouveau réseau de chauffage à distance qui récupère la chaleur de l’eau du Rhône et couvre 90% des besoins de chauffage des bâtiments.