Au delà de l’abri
Joanie Goulet
28. octubre 2019
Vue de l’avenue de France avec le monument Mandela en arrière-plan. (photo : acau architecture sa / Marcel Kultscher)
Trop nombreux sont les requérants d’asile qui ont été logés dans des abris de protection civile, sans fenêtre ni lumière naturelle. Le dernier projet de l’Hospice général laisse toutefois espérer de plus beaux jours pour les migrants arrivant en Suisse.
C’est devant le siège du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (UNHCR) à Genève que s’élèvent du haut de leurs cinq niveaux les deux nouveaux bâtiments du centre d’hébergement collectif Rigot. La capacité d’accueil du site est de 370 personnes. Malgré la baisse d’affluence de migrants en Suisse, le centre qui a été inauguré en septembre est déjà bien rempli. Des enfants courent sur les coursives, des vêtements sèchent au soleil, un vieil homme balaye le sol au rez-de-chaussée. L’implantation du projet conçu par le bureau genevois acau architecture sa permet à ses occupants de socialiser entre eux mais aussi avec le quartier. Les deux bâtiments s’alignent perpendiculairement à l’avenue de France, en continuité du collège Sismondi. Les coursives extérieures déployées en vis-à-vis génèrent une ouverture perméable à l’échange et un sentiment de vie communautaire. En bordure de la voie publique, les jardins potagers sont des lieux de rencontre avec les voisins, notamment les collaborateurs du HCR et les jeunes du collège.
Les modules sont ouverts entre eux au niveau des espaces communs au rez-de-chaussée. L’obliquité des porteurs permet de dégager une surface au sol plus importante. (photo : acau architecture sa / Marcel Kultscher)
Toutes les pièces sont adaptables, par exemple, les éléments de cuisine pourraient être retirés et la pièce pourrait devenir une chambre à coucher. (photo : acau architecture sa / Marcel Kultscher)
Le centre d’hébergement collectif Rigot tire son nom du parc où le projet est implanté. L’autorisation d’occuper le site a été délivrée pour une durée de 10 ans. Il s’agit donc d’une construction provisoire qui nécessitera un jour d’être déplacée. Les architectes ont opté pour une construction modulaire en bois. Les 7000 mètres carrés de surface se répartissent en 230 modules de 3 mètre de largeur par 11 mètre de longueur. Tous les modules ont été préfabriqués à Yverdon-les-Bains dans le nouveau centre de l’entreprise JPF Ducret. Chaque module est composé d’un cadre parallélépipède en mélèze massif. Les faces du volume sont fermées par des panneaux BLC aux parois et plafond et des panneaux CLT au sol. Les façades extérieures sont bardées de chêne genevois laissé brut de sciage. Les architectes ont poussé la réflexion du concept du provisoire jusqu’au choix des fondations. Contrairement à de nombreuses constructions modulaires et provisoires qui sont posées sur un radier en béton, le centre Rigot repose sur des pieux de mélèze et des semelles filantes en épicéa, liés par une grille de répartition en bois. L’impact sur le terrain est ainsi réduit et les fondations pourront être retirées, déménagées et réutilisées.
Les panneaux BLC en sapin ainsi que les cadres en mélèze sont laissés apparents à l’intérieur des modules. (photo : acau architecture sa / Marcel Kultscher)
Le programme du projet tente de favoriser le confort des migrants. Chaque unité d’habitation dispose de son propre espace de cuisine et de son propre bloc sanitaire. Les modules sont conçus pour s’adapter aux différents groupes d’arrivants, allant du deux pièces pour la personne seule au huit pièces pour les familles nombreuses. L’assemblage des pièces s’articule par des ouvertures entre les modules qui peuvent s’ouvrir et se refermer au gré de la demande tout en respectant les normes feu entre les logements. Le programme comprend aussi des espaces communautaires propices aux activités d’insertion : une salle de conférence ou communautaire d’une capacité de 100 personnes, un espace atelier-cuisine et de cours divers, un espace ateliers polyvalents, un espace enfants, une petite salle de cours informatique, une petite salle de sport, un atelier et une surface commerciale vouée à l’échange entre les migrants et les Genevois.